La Limousine 4
Un boucher poète
Ce n'est que lorsqu'il a accompli sa longue et lourde tâche que le boeuf et la vache limousine finit par donner sa viande à la corporation des bouchers de Limoges,dont la puissance économique et sociale au cours des siècles passés est encore visible dans les dorures baroques de la chapelle Saint-Aurélien ,quartier de la boucherie justement ,le coeur médiéval de la ville.
Il donne aussi son cuir aux tanneurs de la Vallée de la Vienne, son suif aux fabriquants de bougies , ses os et ses cornes aux boutonniers.
Et surtout, il nourrit les grandes villes. Sur les 12091 animaux à l'engrais recensés par la statistique de 1808, plus de 8000 sont exportés hors de la région , vers Paris, principalement et aussi vers Lyon ,Toulouse , Bordeaux. Les troupeaux partent bien sûr à pattes, accompagnés de bouviers à pieds que la tradition régionnale appelle les "toucheurs".
La statistique de 1808 raconte ainsi la chose:"Un marchand achète une bande de boeufs; un toucheur avec son chien peut en conduire environ quatorze. Le trajet est de douze à quatorze jours. Mais le voyage est fatiguant; à l'arrivée ,le boeuf a perdu 60 à 80 livres de son poids. En revanche sa chair est plus savoureuse et plus nourrissante".
Une appréciation gustative partagée par les professionnels: à la fin du siècle dernier , le président de la corporation parisienne des bouchers ,un Monsieur Briotet dont la pospérité n'a pas retenu le prénom trouve , pour parler de cette viande ,des accès lyriques dignes de Brillat Savarin, d'Alexandre Dumas et de quelques autres classiques de la littérature de gueule." La réputation de la race limousine est assez répandue pour qu'elle n'aspire qu'à conserver et à continuer à doter les gourmets parisiens de ses rotis qui font leur joie et leurs délices .Nous ne faisons ici que constater les éminentes qualités de cette race superbe ".